Detail du livre : SAINT-AGREVE D'HIER ET D'AUJOURD'HUI
Paru en 2013

SAINT-AGREVE D'HIER ET D'AUJOURD'HUI

ROGER DUGUA

144 pages - 110 illustrations - Format : 165X240 - 24.30 €

 
Couverture du livre : SAINT-AGREVE D'HIER ET D'AUJOURD'HUI

Voilà 20 ans Léon Tourasse nous gratifiait avec son énergique faconde d'un ouvrage qui nous invitait à parcourir Saint-Agrève d'hier à aujourd'hui
En 2013 ce livre, entièrement remanié et actualisé par Roger Dugua historien local bien connu des habitants des Boutières, en garde toute la saveur et l'esprit. Il nous invite à redécouvrir les rues, les places, les maisons au travers d'une sélection de cartes postales rares et pittoresques, du début du XXe siècle à nos jours.
Ensemble parcourons Saint-Agrève d'hier et d'aujourd'hui...
Qui se souvient de l'arrivée du chemin de fer,des touristes qui affluèrent et des nombreux hôtels qui se construisirent alors ? A l'époque on y côtoyait des personnalités en vue, Marcel Pagnol écrivain, Edouard Herriot Maire de Lyon...
Qui se rappelle, les foires, les corsos fleuris et la clique, les parties de luges dans la rue de l'Eglise ou le Ski dans le pré de Calabre, les tournois de tennis réputés ?
Qui se souvient des lavoirs publics, de la grande crue de l'Eyrieux, de la halle couverte, des débuts des entreprises... ?
Le regard à la fois curieux et tendre, parfois inattendu, que l'auteur porte sur la ville, fait renaître pour nous tout un pan de la vie de Saint-Agrève et de ses habitants et nous incitent à regarder de tous nos yeux le nouveau Saint-Agrève qui se dessine et déjà  s'avance.
Un livre fort d'évocations, un livre passionnant où humour et sensibilité se mêlent et nous invitent page après page au voyage.
N°ISBN : 9782911584442
Disponible en luxe : 57.20 €

-EXTRAIT-
 

     En 1830, elle n’était qu’un chemin bordé çà et là de quelques maisons et de rares masures. Sous Napoléon III, elle commença à prendre l’aspect que nous lui connaissons aujourd’hui. La Municipalité Cheynel la baptisa, il y a environ 80 ans. Léon Tourasse avait entendu tant de versions différentes sur les origines de son nom qu’il avait cru bon de n’en retenir que deux qui lui semblaient les plus vraisemblables. Dernièrement lors de notre passage à Saint-Agrève, plusieurs personnes nous ont confirmé ces légendes. -Sa physionomie générale, sa pente, ses escaliers, ses pavés rappellent étrangement les venelles qui escaladent la butte de Montmartre : « Monte la rue et tu verras Montmartre » d’où le nom de Petit Paris. -Un drôle d’individu venu de la ville, grand coureur de jupon, aurait été agréablement surpris de la grâce et du bon accueil de ses habitantes qu’il se serait écrié « Mais c’est un Petit- Paris ».
     C’était l’une des rues les plus caractéristiques du bourg où à l’angle de la Grand’ Rue vivaient Léon Roux plus connu sous le nom de « Petit Léon » et sa femme Hortense qui tenait ses interlocuteurs à distance par une grêle de postillons. Beaucoup se souviennent de leurs trois enfants, Emile, Edouard, et Louis, le maire de Montéléger et le dernier survivant à avoir vu en direction de Saint-Julien Boutières, au pont de la Molle, les Mounines (en patois) : guenon qui faisait avancer le train avec leur queue. Là où se trouve maintenant le four à pain du boulanger, on pouvait voir la forge de Fernand Fillit, également ancien cafetier. Il était aussi maigre que son fils dit « Pneu Michelin » était gros et cette disparité leur valut quelques quolibets. Ils déménagèrent par la suite au sous-sol de l’immeuble suivant où, au niveau de la rue, M Cheynel, grand père de Roger Cheynel, ancien conseiller général, tenait une boutique de marchand de vin. Il eut pour successeurs MM. Chanéac et Fraysse dit « Quédi », époux de dame Cornut dite « la Ratoune » ; Edouard Roche, facteur mais aussi spécialiste des truites de l’Aygue Noire et ses enfants Milou et Rachel.
     La maison suivante était occupée à la fois par la douce Coralie, laveuse et repasseuse et les époux Gray et leurs six enfants dont Gaby, journaliste, mariée à l’oncle d’Hervé Bazin. A leur départ, M Blachier fit rénover la maison et l’occupa avec son épouse née Grand jusqu’à leur décès. Elle appartint ensuite à son petit neveu, M. Vaucanson qui la vendit à M. Valla.
     Nous voici maintenant chez M. Mas dit « le Barre », oncle à Jacquetout qui promenait sa chèvre en laisse et étanchait longuement sa soif chez Menut, des Jougs. Sa femme, dite « la Mie » ou « la Mille » tout en faisant commerce de viande caprine, s’occupait également de la voirie en ramassant papiers et cartons. Le premier habitant à main gauche en descendant était Louis-Henri Reymond. C’était l’ homme de confiance de Fernand Mas qu’il secondait dans sa profession de coquetier. On l’avait surnommé « Grenaille », en raison des marques qui lui constellaient le visage. Ses voisins furent successivement Chanéac, Chapus dit « le Bourru », père de Fredou, et enfin madame Joséphine Vic née Barbe qui vint y amarrer la barque de sa vieillesse secouée par de nombreuses tempêtes. Blanc dit « Parpignol » ou « Parpignan » avait porté ses pénates dans la demeure suivante que la famille Menut a, par la suite, transformé en fabrique de jougs. Julie Arsac dit « la Créque » occupait la maison suivante, reconstruite par M. Clément, propriété Paya.
     On trouvait ensuite Picot, dit « le Barra » en raison d’un splendide costume rayé qu’il arborait dimanches et jours de fête. Manœuvre et livreur de charbon aux gages de Frédéric Bruyère, il avait pour la dive bouteille une passion si exclusive qu’il en battait comme plâtre sa femme, la douce Fanny, alors qu’il entonnait à tue-tête : « J’em…le Roi et le Comte d’Artois…etc ». Avec son ami Jouve dit « le Noir », ils s’étaient acquis une belle réputation que les anciens fredonnaient dans le quartier : « le Noir et le Barré sont deux vilains cadets… ». Léon Tourasse avait entendu dire que poussés par les vapeurs de l’alcool et un zèle d’anticléricalisme exagéré, ils avaient un beau soir renversé la croix du quartier de Ribes. Dans l’immeuble suivant vécut M. Berthier avec ses deux filles, Marie et Joséphine, dit « Finou ». Ses cheveux frisés comme le poil d’un caniche lui valurent le sobriquet de « Cagnosse ». Juste en-dessous, demeurait Catherine Lafont, dit « la Sans Peuse » et son frère Joseph Jacquemond dit « José le Campanier ». Ses bras portaient de merveilleux tatouages. Au rez-de-chaussée, on trouvait Sulpice Bellat dit « Sulpice », vétéran de la guerre du Mexique qui racontait volontiers son débarquement. Après eux passait, presqu’inaperçu, le petit Boulon, dit « Jeansou », qui apporta sa modeste part à la construction du clocher de l’église.
     Avoisinant avec lui, les demoiselles Desroys, « les Desroysses », qui auraient été danseuses aux Folies Bergères ou au Moulin Rouge, se prétendaient parentes de la mère du poète Lamartine. Elles subsistaient en vendant un peu de mercerie et l’une d’elles faisait du colportage de porte en porte « le fil au conscrit ». La masure suivante s’écroula en hiver sous le poids de la neige. Ravachol dont nous avons déjà parlé, réussit à crever le toit de chaume et en sortit indemne, comme un diable de sa boîte.
     La dernière bâtisse abritait Julien Reynaud et sa grand-mère Julie. Il fabriquait des charrues toutes plus perfectionnées les unes que les autres, si bien que la marque « le Tournesol » était nationalement connue. Son aptitude à résoudre tous les problèmes même les plus délicats, lui avait valu le sobriquet de « Jamais emm… ». A l’angle de la Grand’Rue se succédèrent Eyraud, marchand de journaux, Emile et Lucien Grand, cordonniers…
     En face de la maison où résidaient « le Gavé et la Gavelle », se dressait dans le jardin, une maisonnette où régnait en maître Bouvet, dit « le Suisse ». Cordonnier de son métier, il mourut subitement en grand uniforme, sa hallebarde à la main. Il avait épousé Constance de Gonzenac qui, chaque matin, pour accompagner son petit déjeuner, n’oubliait jamais de boire un verre d’eau de vie et qui vécut plus de 90 ans.

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