Detail du livre : LA MÉMOIRE DU GOUT EN ARDECHE ET HAUTE-LOIRE
Paru en 2015

LA MÉMOIRE DU GOUT EN ARDECHE ET HAUTE-LOIRE
RECETTES ET CONTES GOURMANDS DE NOTRE TERROIR

MAX PONCE

128 pages - 20 illustrations - Format : 165X240 - 16.00 €

 
Couverture du livre : LA MÉMOIRE DU GOUT EN ARDECHE ET HAUTE-LOIRE
Une odeur, une saveur et notre mémoire se réveille.
Quelques souvenirs aussi frais que les événements de la veille refont surface ! Une caillette ardéchoise et voici la ferme de l’oncle Albert le soir de la «tuade»…
L’odeur d’un plat d’écrevisses, c’est la tante Fernande aubergiste à Grozon qui réapparaît dans son grand tablier bleu…
Un beau panier de cèpes, voilà le cousin Raymond de Costaros qui n’avait pas son pareil pour les dénicher…
C’est autour de ce phénomène à la fois curieux et partagé, que l’auteur invite le lecteur à travers ces recettes et ces contes, à retrouver ce qui fait l’attachement à ce terroir.
Avec la Mémoire du Goût en Ardèche et en Haute-Loire, réveillez vos souvenirs et vos papilles et parcourez le chemin qui réunit les mots, les saveurs, et les souvenirs !
N°ISBN : 9782911584558
Disponible en luxe : 57.20 €

-EXTRAIT-
 
     Le saviez-vous, cher lecteur, nos papilles gustatives fonctionnent mieux que le plus sophistiqué de nos ordinateurs. Donnez-leur un simple morceau de caillette élaborée comme autrefois et vous voilà transporté dans un monde que vous aviez peut-être enfoui au tréfonds de votre mémoire.      
Les images arrivent les premières suivies des odeurs puis des émotions. C’est le repas du dimanche chez la tante Louise et l’oncle Albert. Vous aviez sept ou huit ans, la cousine Suzy en avait un ou deux de plus et prenait déjà des allures de jeune fille qui vous faisaient un drôle d’effet. L’horloge de la cuisine toute patinée par des générations de fumée du feu dans la cheminée avait sonné douze coups.      
A table ! Avait annoncé la tante, caillettes chaudes en entrée, ne les laissons pas refroidir ! Bon Dieu ! Quel fumet s’échappait à ce moment là du fourneau tout noir orné de ses accessoires de cuivre rutilants ! On s’installait autour de la table, vous à côté de la cousine Suzy et votre cœur cognait dans votre poitrine, on ne sait pas trop pourquoi. Etait-ce la promesse d’un repas sans égal ou la cuisse de la petite qui venait s’appuyer contre la votre ?      
En tous cas, cinquante ans plus tard tout est là, intact, non pas comme une photo jaunie par le temps mais comme un film en couleur et en trois dimensions. C’est à partir de cet étrange phénomène, si bien évoqué par Marcel Proust avec sa fameuse madeleine, que j’ai voulu écrire ces pages destinées à raviver vos souvenirs lointains attachés au goût des spécialités traditionnelles de notre Ardèche bien aimée et de son voisin la Haute-Loire.      
Comme toute personne de bonne foi le reconnaîtra, les spécialités culinaires ne s’arrêtent pas aux limites des départements représentés en pointillés sur les cartes. Nos voisins Vellaves ont partagé et partagent encore avec les ardéchois de nombreuses traditions culinaires avec quelques recettes typiques que je ne manquerai pas de souligner.      
Jamais je n’aurais pu écrire ces pages si dans mon histoire familiale n’avait existé grand-mère Juliette. Le jour sans école -béni des Dieux- était alors le jeudi. C’est à lui que je dois ma culture gastronomique. A midi, ce jour là, j’étais l’invité d’honneur à la table de Juliette et je n’aurais, pour rien au monde, manqué ce rendez-vous gourmand.      
Il faut dire qu’elle était une cuisinière exceptionnelle, un cordon bleu comme on le disait à l’époque. Au temps de sa jeunesse, pour faire carrière, nul besoin d’avoir bac plus cinq, la volonté, la passion et le courage suffisaient. .      
Peu douée pour les études grand-mère faisait le désespoir de son institutrice qui ne trouva rien de mieux que de lui confier la préparation de ses propres repas, puisque son élève s’obstinait à ne vouloir parler que patois. Entre-nous, il est amusant de penser que de nos jours on a créé des universités de langues régionales ou patoisantes et qu’en ce temps là, les parler à l’école vous condamnait irrémédiablement au piquet. Enfin, mieux valait la cuisine de l’institutrice que le piquet dans le couloir. .      
C’est ainsi que Juliette révéla son étonnant talent, si bien qu’après son échec au certificat d’études l’institutrice conseilla à ses parents de l’orienter dans ce qu’on appelle aujourd’hui les métiers de bouche. Peu fortunés mes arrières grands-parents ne pouvaient lui offrir ni école ni formation et c’est pourquoi ils décidèrent de placer leur fille dans ce que l’on nommait alors «les grandes maisons».      
Quelques années plus tard, après de longs stages d’épluchage et de vaisselle qui ne lui convenaient guère, elle devint la cuisinière de la maison du musicien Vincent d’Indy, ardéchois célèbre en son château de Vernoux puis du Président Emile Loubet à La bégude de Mazenc dans la Drôme, lors de ses séjours sur ses terres d’origine, ainsi que de quelques généraux étoilés.   Belle carrière pour celle qui avait enfin réussi au contact des grands bourgeois à troquer son patois ardéchois contre un français de bon aloi. Et quelle fierté lorsque ses employeurs la faisaient appeler à la fin d’un repas pour la féliciter devant les invités repus et enchantés !      
Certes nos déjeuners du jeudi n’étaient pas faits de grande vénerie ni de civets de lièvre mais le moindre gratin de courges ou ragoût de mouton étaient autant de chef d’œuvres encore présents dans ma mémoire. Mais il y avait aussi les repas de fêtes, Noël et Pâques et autres communions où lorsque nous entrions dans sa cuisine les délicats fumets de ses préparations nous enivraient bien mieux que tous les apéritifs.      
A Noël les salmis de grives, à Pâques le chevreau en gelée et bien d’autres merveilles.      
Pour avoir mangé aux tables des chefs les plus réputés de France j’affirme qu’aucune, des Trois Gros, Boccuse, Bras, Gagnaire ou Veyrat ne m’ont procuré autant d’émotion que les repas de fêtes chez grand-mère Juliette.      
Je vous invite donc à travers cet ouvrage à parcourir le chemin du souvenir des papilles, le chemin de «La mémoire du goût».

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